Décembre |
Imaginer que l'oubli est la parole la plus entendue. |
Qu'un Post-it se rappelle à moi en me soulignant la chose à ne pas oublier parce que je ne suis plus libre de rien et l'écrit rattrape ma pensée alors que d'ordinaire c'est la démarche inverse qui me guide. |
Que l'on me croit telle que mon image me véhicule. |
Etre enfermée dans mes doutes et oublier de me servir du véhicule de l'apparence mis à ma disposition. |
Taire, faire et broder du silence avec mes doigts d'encre. |
Faire face à mon alter ego et être obliger de me laver les mains. |
Etancher, sans m'épancher. |
Manquer d'étanchéité et malmener mon trop plein de sensibilité. |
Respirer sans épée de Damoclès. |
Qu'on m'empêche de respirer alors qu'il y a de l'air tout autour de moi. |
Faire face à mon purgatoire ; état intermédiaire entre le sommeil et le réveil. |
Caresser l'idée d'un paradis qui est, et ne serait, que virtuel ! |
Novembre |
Assortir mes tenues aux saisons et aux couleurs avoisinantes. |
Qu'on le remarque qu'on le gratifie d'un : "Tiens voilà le printemps !". |
Le devenir du présent. |
La fixité de l'avenir. |
Evoquer le futur parfois proche. |
Le passé composé et ses tonalités de regrets. |
Ecouter l'autre jusqu'à plus soif. |
Que l'on m'oblige à me désaltérer lorsque je n'ai pas soif. |
Tarder sans pour autant m'attarder. |
Etre retardée dans ce que je tarde à formuler. |
Déboussoler, désarçonner, étonner... |
Perdre mon mords, ou encore que l'on braque un regard sur moi jusqu'à ce que je devienne passe-muraille... |
Octobre |
Monter en haut avec un clin d'oeil au pléonasme. |
La descente aux enfers empreinte à Orphée. |
Me dire qu'il n'est jamais trop tard. |
Tarder à souhaiter les meilleurs choses aux gens que j'aime de peur qu'ils ne m'aiment plus. |
Tarder à croire de façon définitive et péremptoire. |
Mettre des mois à franchir le cap du doute pour appuyer mes arguments. |
Dire : écris-moi sans faute. |
Recevoir en retour une lettre avec la mention "N'habite pas à l'adresse indiquée". |
Les odeurs musicales. |
Les mots sans couleur et fiers de l'être. |
Entendre résonner le bruit des sabots d'un cheval. |
Que résonnent en moi les sabots ferrés du passé qu'un cheval aimé me rappelle. |
Septembre |
Me dire les choses avant de les écrire. |
Oser les écrire directement au propre et prendre le risque de regretter le passage, réconfortant, par le brouillon. |
Entendre rire des enfants dans une cour de récréation. |
Les imaginer rire, seuls, sans spectateurs. |
Autant écrire les sentiments que de les murmurer dans une oreille amie. |
Dire à voix haute le même texte qu'à voie basse. |
Eclater de rire face à une situation désopilante au risque, parfois, de paraître impolie. |
Contenir de la joie sous prétexte qu'il faut bien se comporter. |
Les faits. |
Les situations qui les atténuent. |
Les mystères. |
Les fausses pistes. |
Août |
Donner à croire. |
Croire avoir donné à quelqu'un qui a depuis longtemps (toujours ?) tout pris. |
Etirer ma langueur d'état d'âme en contemplant la manche se retirer. |
Voir des vagues envahir le plat pays et n'avoir que la langueur comme pâle souvenir. |
Courir entre les gouttes lorsqu'elles ne forment pas un océan tumultueux. |
Devoir éponger une vallée de larmes qui déborde de mon mouchoir. |
Avoir des réserves. Surtout. Sur tout. |
Tomber, ni en panne sèche, ni en panne d'encre. |
Juillet |
Me savonner les mains pleines d'encre. |
Constater que la mousse du savon ne soit pas bleuie par l'encre des mots. |
Provoquer des trous de mémoires délibérés. |
Que s'installe en moi un doute mémorable qui me fige face à une page blanche. |
Sentir un morceau de sucre fondre et devenir un lac de douceur. |
Que ce même lac se produise sans que j'ai ressenti le stade de l'éparpillement. |
Imaginer que le chef d'orchestre a le même rôle qu'un écrivain. |
Croire qu' un écrivain se prend pour un chef d'orchestre confondant ainsi la gamme et la phrase ; tout correspond sans aucun doute mais c'est au lecteur seul d'établir cette correspondance. |
Que les mots sonnent juste. |
Qu'une note reste creuse en dehors de son sens. |
Le oisif lorsqu'il produit de la réflexion de son ennui. |
La trop sérieuse et consciencieuse réflexion qui se prend pour ce qu'elle n'est pas. |
Juin |
Etablir des rapports et des analogies. |
Un monde sans correspondance, ni écho qu'aucun lien ne file, ni ne tisse pour personne. |
Aimer tout simplement. |
La forme simple du verbe aimer non conjugué aux temps composés. |
L'harmonie des gammes sous couvert d'arpèges édictés à l'unisson. |
La discontinuité des mots perdus dans une page sans nuage ni cohérence musicale. |
Les mots autant que les délices sucrés. |
Devoir me réfréner d'en déguster quand le bon mot échappe au bon vouloir de mon stylo. |
Me contraindre à remplir les pages de petits signes noirs et distincts. |
Les voir s'éparpiller et, parfois, se dissimuler sous des formes auxquelles je n'avais pas pris le temps de songer. |
Voir arriver la fin d'une histoire. |
Le prévisible, car il est souvent synonyme de fugace. |
Mai |
Ecrire dans le silence de mon espace. |
Devoir m'extraire du bruit pour conquérir un espace instable. |
Lorsque l'encre trace mes élans. |
Avoir des élancements dans la main et tomber en panne sèche. |
Le noir pour l'écriture quotidienne des narrations et des descriptions. |
Manquer de rouge quand j'aborde les dialogues. |
L'illusion et le vouloir croire. |
Vouloir croire à ce que tout le monde s'accord à voir. |
Lorsqu'un joueur distribue des cartes rouges et noires. |
Oublier que les valets existent et que je fais, sans aucun doute, partie de leur jeu. |
Avril |
Aimer fort ce que je décide d'aimer fort. |
Que ce que j'aime fort se retourne vers moi et se mette à m'aimer autant. |
Quand le froid gagne les collines et que la température de l'air est menacée. |
Initier un échange quand il fait un soleil radieux et que toutes les conditions sont réunies pour que l'apparence et le superficiel traînent gratuitement. |
Ecrire et créer. |
Qu'en retour, les personnages se jouent de moi et fassent de moi leur personnage. |
Avoir en tête l'illusion d'être à l'origine de l'histoire. |
Une fois en pleine mer ne plus apercevoir ma terre d'origine et en faire toute une histoire... |
Me concentrer sur le sens figuré des mots. |
Les odeurs de propre qui contaminent mes figures au point de les dominer complètement. |
Mars |
Avoir la tête dans les nuages quand j'écris. |
Etre obligée de retomber les pieds sur terre avant d'avoir pu terminer un paragraphe décisif. |
Oublier quand cela m'arrange. |
Devoir penser à mes oublis au jour le jour. |
Enfiler des gants lorsqu'il fait froid (ou pour travailler). |
Cette sensation d'avoir les mains recouvertes d'une autre peau. |
La rondeur des sentiments. |
La platitude des idées reçues. |
Reconnaître ne pas savoir. |
Que l'on ne sache pas reconnaître le savoir des autres. |
Guider et laisser mon corps ondoyer au rythme de la musique. |
Quand les pianistes abusent de la sourdine. |
Février |
Vernir les surfaces planes de mes ongles. |
Avoir oublié le dissolvant en cas de débordement. |
Me dégourdir les jambes avant une attente trop longue. |
Solliciter mes forces sans la perspective de l'obstacle à franchir. |
Assortir les rayures et les matières. |
Les pois et le poids du choix qu'ils m'imposent. |
Apprendre à me passer des choses. |
Passer à travers les choses sans en retirer la substantifique moelle. |
Compter jusqu'à trois. |
Arriver à trois sans avoir eu le temps de goûter aux deux autres. |
L'oubli. |
Son souvenir. |
Janvier |
Hésiter devant une alternative essentielle. |
En faire de même pour des choses dérisoires. |
Démarrer |
Caler. |
Oublier les bonnes choses. |
Etre rattrapée par les mauvaises... |
Penser que le temps des voeux est celui des choix. |
Avoir choisi des voeux trop accessibles ni avoir fait de mauvais choix. |
Dire aux autres ce que je leur souhaite. |
Me projeter et faire miens les voeux adressés à autrui. |
La bonne année parce que je m'efforce de ne voir que les bonnes choses. |
La bonne année quand la précédente a été moins bonne et que le pronostic est couru d'avance. |
Croire que les voeux sont à l'image de l'arbre de vie que mon imaginaire a façonné. |
Imaginer mon arbre de vie devenir celui de tout le monde. |
En somme toutes les années du moment qu'elles s'enchaînent et forment un collier de sens. |
Devoir y penser et ne récolter que deux perles de ce collier imaginaire. |